vendredi 6 janvier 2017

Conférence : le silure bilan de 3 décennies de suivi


La conférence donnée par Jean Claude Tanzilli et Jean Pierre Faure à la fédération de la pêche du Rhône ce mercredi, a fait salle comble (une centaine de personnes).
Avant sa réédition au CNPL à Clermont-Ferrand samedi prochain, je vais tenter de vous faire un résumé. Et de vous donner mon avis.

L'objectif de cette conférence est de donner à tout un chacun des informations factuelles, recueillies durant trois décennies sur ce poisson qui fait tant parler de lui : le Silure Glanis.

C'est ainsi que l'on apprend que le silure était présent dans le bassin du Rhône il y a 8 millions d'années.
Pour les septiques, vous pouvez allez voir au musée de l’Ardèche des fossiles de ces silures (https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/photos-le-nouveau-museum-de-l-ardeche-devoile-sa-collection-de-fossiles-1461155570). A cette époque, c'était le prédateur dominant avec le brochet et l'anguille.
Et depuis, il a été présent dans nos eaux intérieures de nombreuses fois entre fonction des périodes de glaciations et réchauffements.
La première capture relatée en France date de 1569, au sud de Strasbourg dans la rivière ill.
Le climat n'a pas toujours été favorable à son développement et sa représentation dans nos eaux intérieures a été chaotique.

Plus récemment, le silure a commencé à faire parler de lui à partir des années 80, car sa population s'est beaucoup développée suite a cette nouvelle période de réchauffement et des spécimens de taille plus conséquente étaient prit par les pêcheurs.
On note que les années 90 ont été le paroxysme en ce qui concerne le nombre de spécimens capturés. Ensuite, la population de silure a régressé de façon assez brutale dans les années 2000 et enfin une lente et progressive érosion des effectifs s'est mit en place ces dernières années. Par contre, la taille des spécimens est resté en augmentation constante.
Cela a engendré beaucoup de questionnements de la part du grand publique, puis des craintes et enfin des réactions irrationnelles. C'est comme cela que tout récemment les pêcheurs professionnels on fait la demande auprès du ministre de l'écologie, pour classer l'espèce en "nuisible" et conduisant cette espèce à sa destruction systématique.

Il est donc important de répondre à ces questionnements pour rester rationnel et éviter de "casser" des écosystèmes.

C'est là que le travail de Jean Claude Tanzilli réalisé sur 30 ans apporte énormément d'informations. Ce travail c'est de nombreuses captures (environ 17000), des observations (notamment avec 4000 contenus stomacaux et 700 marquages). Avec un tel jeu de données, étudié, analysé et compilé par une équipe de la fédération, on peut commencer à tirer des conclusions; Conclusions qui seraient erronées avec un jeu de données d'une petite centaine d'individus, et encore plus sur une période de quelques années.

Voici donc ce qui ressort de ce travail colossal.

L’espérance de vie d'un silure dans un environnement qui lui convient peut aller jusqu'à 80 ans. Sa croissance est très rapide sur ses premières années de vie, puis est considérablement ralentie lorsqu'il atteint 2 mètres de long (1 à 2 centimètres par an).
On observe une stagnation de la taille à partir de 2m40/2m50 (serait-ce sa taille maximum moyenne dans nos eaux intérieures ?).

Les contenus stomacaux, révèle que de nombreux estomacs sont vides (résultat qui correspond avec ce qui a été observé via des pêches électriques et au filet).
Ainsi, 75% d'estomacs sont vides. L'alimentation du silure est très irrégulière : de longues périodes de jeûnes ont été observées, ainsi que des moments de frénésies alimentaires très courts.
Le silure à une digestion très lente comparable à celle des reptiles. Pour vous donner une idée, un silure de 2 mètre mange 15 fois moins qu'un cormoran adulte en une année.



L'alimentation du silure est très variée 40% de poissons, 30% de mollusques, 20% d’écrevisses et ensuite ce sont des décrets urbains, du substrat, des mammifères, de la nourriture humaine...
Le suivi sur ces 3 dernières décennies montre que le silure va préférer consommer les espèces les plus présentes (brème, carassin, mulet, ... selon le lieu) . C'est ainsi, que dans les années 90 le poisson chat était un de ces met préféré (ce qui a conduit à une régulation de cette espère invasive). Les observations ont révélé une augmentation importante du cannibalisme, comme pour s'autoréguler. C'est dernières années le silure est même devenu le poisson le plus consommé par le silure dans le Rhône lyonnais.

On apprendra beaucoup d'autres choses sur le silure (mais je ne peux pas tout détailler, il faut aller voir la conférence pour cela).


En conclusion, je retiens les points suivants :

1 - Le Silurus glanis est une espèce autochtone,
2 - La population du silure est revenu à la densité des années 80,
3 - Les spécimens les plus gros stagnent en moyenne à 2m40/2m50,
4 - Le silure a une consommation alimentaire très optimisé (digestion très lente),
5 - Le silure s'autorégule par cannibalisme (et parfois lors des combats de la fraie),
6 - Les plus gros silures sont les plus cannibales (un silure peut ingurgiter des silures qui font la moitié de leur taille !) .

Au vu de ces conclusions, le classement nuisible de cette espère me parait incohérent. Pourquoi faire disparaître une espèce autochtone ?
Et si cela est fait, cela risque de dynamiser de nouveau son expansion (plus d'auto-régulation par le gros sujets), donc l'effet inverse souhaité.
Certaines espèces invasives risquent de faire leur retour (poissons chats, écrevisses américaines, corbicules...).
Sans parler de l'impact budgétaire, car les cadavres de poissons de telle taille doivent être traités sans quoi on s'expose à des troubles de la santé publique.
Quant à leur consommation massive, au vu du taux de PCB que concentre ces poissons (qui sont au sommet de la chaîne alimentaire), il serait irresponsable de l'autoriser.

Laissons donc faire la nature et pour les ouvrages artificiels (passes à poissons), mettons en place des systèmes de répulsions des silures (ex : champs électriques) pour qu'ils aillent jouer leur rôle sur le reste des cours d'eau. Bien que les fédérations soutiennent cette étude factuelle, la décision finale reste éminemment politique (avec le jeu habituel des lobbies), c'est pourquoi je me suis fendu de ce billet.

Je tiens à remercier les auteurs de cette conférence, pour ce travail minutieux et de longue haleine, qui rend ce poisson un moins mystérieux. Et tout particulièrement Jean Claude Tanzilli pour avoir constitué ce jeu de données, qui est à ce jour le plus complet sur un poisson en Europe.


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